Comme son nom l’indique, la bienveillance est la vertu qui consiste à être bienveillant, c’est-à-dire à faire le bien. Par opposition, on est malveillant à partir du moment où l’on fait intentionnellement le mal. Mais, qu’est-ce que le bien ? D’une manière générale, nous pouvons considérer qu’il s’agit de toute pensée, toute parole ou toute action contribuant au bonheur des autres. Par opposition, le mal correspond à tout comportement mettant en cause leur intégrité physique, mentale ou spirituelle. Pour paraphraser ce que tous les sages du passé ont enseigné à ce sujet, la bienveillance consiste donc à faire à autrui ce que l’on voudrait qu’il nous fasse et à ne pas lui faire ce que l’on ne voudrait pas qu’il nous fasse. Cela implique, sinon d’aimer notre prochain, du moins de le respecter et de ne jamais chercher à lui nuire, de quelque façon que ce soit et pour quelque raison que ce soit.
D’un point de vue philosophique, il est plus difficile de faire le bien que le mal, tout du moins tant qu’on n’a pas atteint un niveau de conscience suffisamment élevé. En effet, faire le bien implique un effort constant pour mettre le meilleur de soi-même au service d’autrui ou d’une noble cause. À l’inverse, pour faire le mal, il suffit de laisser nos défauts se manifester dans notre comportement, voire même de nous limiter à être passifs. À titre d’analogie, il est impossible d’avoir un beau jardin si l’on ne s’emploie pas régulièrement à le cultiver et à l’entretenir, ce qui nécessite un travail permanent. Dans le cas contraire, les mauvaises herbes l’envahissent rapidement, le dénaturent et le transforment en friche. De même, la bienveillance nécessite, non seulement de faire le bien, mais également de s’opposer au mal, d’où le symbolisme traditionnel de l’Épée flamboyante.
En extrapolant quelque peu les explications précédentes, nous pouvons dire que la malveillance est l’absence de bienveillance. Apparemment, il s’agit là d’un truisme. Pourtant, tel n’est pas le cas, car l’expérience prouve que ne pas faire le bien peut s’apparenter au mal, et ce, d’autant plus que l’on a conscience de ce qui est bien ou mal dans le comportement humain. Cette notion est d’ailleurs présente dans la plupart des religions, puisqu’elles condamnent aussi bien les erreurs par commission que les erreurs par omission. Dans l’absolu, cela signifie par exemple que ne pas venir en aide à une personne qui tombe à proximité de nous est presque qu’aussi coupable que de la faire tomber. Naturellement, cet exemple peut sembler caricatural, mais il montre que faire le bien, ce n’est pas se limiter à ne pas faire le mal. Par extension, on est pas bienveillant sous prétexte qu’on n’est pas malveillant; on peut tout simplement être neutre. Or, la neutralité n’est pas nécessairement quelque chose de positif.
Si l’on ne peut nier que nombre de personnes aspirent à faire le bien, il y en a relativement peu qui concrétisent cette aspiration par des actes correspondants, au point d’en faire l’idéal de leur vie. En revanche, celles qui sont animées par le désir de nuire sont souvent très actives pour mettre en pratique leur malveillance, car cela correspond à un besoin “vital” pour elles et leur sert d’exutoire. C’est pour cette raison que le mal semble si présent dans la vie courante, d’autant plus que nous y sommes à la fois sensibles et sensibilisés. Cela dit, et contrairement à ce que l’on pourrait croire à priori, le bien, lorsqu’il est actif, est en réalité beaucoup plus puissant que le mal. En termes de comparaison, sa supériorité est semblable à celle de la lumière sur les ténèbres, tant il est vrai qu’une simple lueur suffit à éclairer l’obscurité. Sans aller jusqu’à considérer les cas extrêmes de malveillance, qui fort heureusement sont relativement rares, il faut reconnaître que ce défaut de la nature humaine est assez fréquent dans ses formes les plus anodines en apparence. Dans cet ordre d’idée, vous remarquerez que nombre de personnes sont plus enclines à critiquer leur prochain qu’à faire l’éloge de ses qualités. Ainsi, très rares sont les conversations ou les discussions au cours desquelles “on” ne dit pas de mal d’untel ou untel. À cet égard, la médisance a de nombreux adeptes et porte en elle tout un cortège de méchancetés. Pire encore est la calomnie, car elle se nourrit de haine et se délecte dans le mensonge. La bienveillance implique au contraire de ne jamais médire de quiconque et, naturellement, de ne calomnier qui que ce soit.
S’il est un fait que la médisance et la calomnie constituent en elles-mêmes deux formes de malveillance, se complaire à écouter ceux qui médisent ou calomnient est tout aussi coupable. Dès lors que l’on est profondément bienveillant, on doit se refuser pareille complaisance et même montrer que l’on n’apprécie pas d’entendre des propos malveillants à l’encontre d’autrui. Comment ? Soit en prenant congé de notre interlocuteur, soit en “positivant” la conversation. Cela n’est pas toujours facile et nécessite un certain courage, car peu de personnes apprécient qu’on leur fasse remarquer, même avec tact et courtoisie, que l’on ne se grandit pas en rabaissant les autres. Mais lorsque l’on a choisi d’oeuvrer au service du bien, il faut savoir montrer sa différence morale et ne pas cautionner un comportement que l’on désapprouve. Si on ne le fait pas, on se rend complice de malveillance, car chacun sait que “Qui ne dit mot consent“.